Pour la Coupe du monde, l’Algérie est
prête. Il s’agit de la société, pas de l’équipe. Car, de l’équipe, on ne
sait pas grand-chose. Les joueurs et l’entraîneur jurent de leur succès à
venir. Alors même que les commentateurs de presse et les spécialistes ne voient
que les faiblesses. S’il
est difficile de juger du niveau de préparation de l’équipe nationale, on peut,
en revanche, constater que les Algériens se sont préparés au grand rendez-vous.
Les téléviseurs et les abonnements aux chaînes qui offrent la
retransmission des rencontres se sont vendus en masse.

Les plus chanceux des Algériens ont pu
s’offrir le luxe d’assister en Afrique du Sud aux matchs du onze national. Les
autres auront le modeste privilège de ne pas travailler ce dimanche après-midi [13 juin]. Les plus “intègres”
ont pris leur congé. Certains envisagent, paraît-il, de s’absenter de leur
propre chef. Quel est le
patron, employeur ou simple manager, qui osera sanctionner un tel élan
nationaliste ? Jusqu’ici, l’incivisme consistait à retenir le personnel à
l’heure de la prière ; désormais, les matchs de l’équipe nationale de football
font partie des forces majeures pouvant justifier la désertion rémunérée du
poste de travail.


Les entreprises Djezzy et Nedjma, partenaires attitrés de l’Algérie, ont donné l’exemple, en décrétant l’après-midi
“chômé et payé”. Une prospère compagnie d’assurances libère ses salariés le
temps de la rencontre.

Dans cette
frénésie d’avant-match, on aura remarqué la sérénité des officiels. Ce qui contraste avec l’agitation qui a
précédé les deux récentes confrontations avec l’Egypte [en phase finale de qualification pour la Coupe
du monde, l’Algérie a éliminé l’Egypte ; de violents affrontements entre
supporters ont créé un incendie diplomatique entre Alger et Le Caire], mais
aussi avec l’enthousiasme à la veille de la coupe d’Afrique des nations (CAN).

Tout se passe
comme si l’on ne voulait pas s’engager pour une équipe qui n’a pas donné de
signes prometteurs quant à la qualité de sa participation. Les récentes
prestations de l’attelage de Saâdane [le sélectionneur] ne justifient
apparemment pas le même investissement politique que celui accompli à Luanda.
[Lors de la dernière CAN, l’Algérie a été battue
par l’Egypte 4 à 0 en demi-finale ]. Parions que
tout le monde attend le 13 juin pour se définir. Si l’équipe bat la Slovénie, le satisfecit et les encouragements fuseront
de partout, de ceux qui n’auront jamais douté que nos joueurs se surpassent
toujours quand il s’agit de la défense des couleurs nationales, suivi en cela
par les experts qui expliqueront a posteriori l’apport de nos joueurs
d’exception et la pertinence de la stratégie de Saâdane.

Nous voilà donc suspendus, pour quelques
jours, au résultat d’une équipe qui doit nous faire oublier la médiocrité du football en Algérie – le niveau de notre
championnat n’en finit pas d’être lamentable. Il y a,
cependant, une lueur d’espoir : l’année prochaine, le
football national se professionnalise. Ne demandez surtout pas comment on va
s’y prendre pour privatiser des clubs qui s’intéressent plus aux tractations
politiques qu’à la formation des joueurs. Dans un pays qui n’a pas un terrain
praticable dans sa capitale ! Ne le demandez pas : sachez juste que c’est
décidé.