Après deux participations de suite en Coupe du monde durant les années 1980 (1982 et 1986), les premières du genre pour l’Algérie, la sélection nationale de football a dû attendre 24 longues années pour enchaîner avec deux nouvelles apparitions au plus grand événement footballistique de la planète. Elle a décroché une quatrième participation au Mondial qu’organise le pays du football et de la samba, quatre ans après avoir renoué avec la compétition en Afrique du Sud.Toutefois, aussi paradoxal que cela puisse paraître, l’Algérie, est loin d’avoir un championnat relevé qui expliquerait ce succès. En effet, depuis que les Verts ont renoué avec la Coupe du monde en se qualifiant en 2010, on s’attendait à un véritable boom du football au niveau national, comme cela s’est produit d’ailleurs un peu partout dans le monde.Hélas, c’est loin d’être le cas pour ce qui est de notre championnat, dont le niveau ne cesse de régresser d’année en année. Et ce n’est pas l’instauration du professionnalisme – qui en est à sa quatrième année – qui changera grand-chose, avec un championnat d’un niveau médiocre et des clubs à la traîne à l’échelle continentale.“Equipe de France-bis”Pour comprendre le pourquoi et le comment de la réussite de la sélection nationale au moment où le football national vit ses pires moments depuis l’indépendance, il faut se pencher sur la composante même de cette équipe.En effet, pour beaucoup de spécialistes, la sélection nationale est loin de représenter le football du cru, pour la simple raison que nos capés sont pour la plupart issus de l’émigration et non du championnat local. Plus de 90 % des éléments ayant participé aux deux conquêtes mondiales de 2010 et 2014 sont issus de l’émigration : des joueurs formés à l’étranger, et plus particulièrement dans les centres de formation français.  De ce fait, la qualification des Verts est le fruit de jeunes joueurs talentueux formés à l’étranger et qui ne connaissent pas, pour la plupart, le football national et ses différents championnats, donc non formés en Algérie. Une “équipe de France-bis”, comme aiment d’ailleurs à l’appeler certains, même si cela dérange avec un terme considéré comme péjoratif. Il représente pourtant bien nos binationaux, formés en France et ayant même porté le maillot tricolore chez les jeunes, à l’image des Yebda et Meghni, et plus récemment Brahimi et Belfodil, pour ne citer que ceux-là. Quatre années de “faux-professionnalisme”Nos clubs ne forment plus, c’est un fait avéré, et ce n’est pas l’avènement du professionnalisme “imposé” depuis quatre ans qui changera grand-chose, tant qu’il n’y a de professionnalisme dans notre championnat que l’appellation.Un professionnalisme qui a ignoré l’essence même du football, en l’occurrence la formation des jeunes. Certaines équipes se sont carrément passées de leurs plus jeunes catégories (l’école pépinière, benjamines et minimes), alors que pour ceux qui en disposent, elles sont totalement à l’abandon, avec d’énormes soucis à tous les niveaux.Un professionnalisme qui ne se distingue que par les salaires faramineux accordés par certains clubs à une majorité de joueurs, qui ne peuvent même pas se targuer d’avoir le statut d’international et dont le niveau constaté de visu sur le terrain laisse à désirer.Absences de nos clubs sur la scène Africaine, le véritable baromètrePour jauger du véritable niveau de nos clubs et des joueurs du cru, et expliquer sa non-représentativité en sélection nationale, il faudra se référer à la participation de nos formations dans les différentes compétitions africaines. A ce propos, c’est la grande désillusion : les clubs algériens n’arrivent plus à s’imposer à l’échelle continentale, avec une dernière consécration à ce niveau qui remonte à 2002, quand la JSK [Jeunesse sportive de Kabylie, club de Tizi-Ouzou], avait réussi à accrocher sa troisième Coupe de la CAF [compétition opposant des clubs africains, disparue en 2003] de suite.Mais depuis, aucun de nos clubs formés de joueurs du cru n’a réussi à accrocher un titre africain, dénotant la faiblesse de nos formations comparativement à leurs homologues africaines et, par ricochet, du niveau du joueur algérien. A titre comparatif, cela n’était pas le cas durant les années 1970, 1980 et 1990, quand nos clubs étaient les plus craints du continent. La formation, le talon d’AchilleC’est sans équivoque pour les techniciens et les spécialistes estiment que tout est une histoire de formation, malgré le fait que les talents existent. Sans formation adéquate, et surtout sans véritable réforme du sport et sans une volonté politique certaine, comme c’était le cas durant la réforme sportive des années 1970, il ne faudra pas s’attendre à voir un impact sur l’échelle nationale.Jouer un Mondial, c’est bien, mais sans formation au niveau local, il ne faudra pas espérer qu’une qualification à une Coupe du monde puisse donner des dividendes au niveau national. Et tant qu’il en sera ainsi, c’est-à-dire tant que les responsables du sport-roi s’autosuffissent en récupérant “un produit fini d’outre-mer”, pour reprendre l’expression d’un technicien, il ne faut pas s’attendre à voir le football national sortir de sa léthargie, même avec des qualifications régulières pour la Coupe du monde. 

Tarek Aït Sellamet
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