Madjer ne croit pas en l'Algérie

La qualification héroïque de l’Algérie pour la Coupe du monde a suscité une énorme attente autour des Fennecs. Elle sera encore décuplée pour leur quart de finale de la Coupe d’Afrique des Nations demain (20 h 30, Orange Sport), contre la Côte d’Ivoire, l’un des favoris du tournoi. Malgré une fierté légitime, l’icône du football algérien, Rabah Madjer, pointe des lacunes profondes: "Le niveau de jeu est faible même si l’équipe s’est améliorée depuis sa défaite initiale contre le Malawi (3-0). Depuis, elle joue très prudemment. C’est normal quand on manque autant de repères au niveau international: vingt-quatre ans sans phase finale de Coupe du monde, les deux dernières CAN manquées, ça laisse des traces. Il est difficile de gagner avec l’art et la manière quand on revient d’aussi loin…"

En tant que supporter, Madjer trouve aux Fennecs quelques circonstances atténuantes. Mais pour l’ancien attaquant du FC Porto, qui a donné son nom à son but du talon inscrit en finale de la Coupe des champions 1987, la faillite offensive algérienne (1 but en 3 matches) est intolérable: "Nos attaquants sont totalement absents de cette CAN! Ils sont isolés parce que les milieux de terrain sont collés à la défense de peur d’encaisser un but." Le sélectionneur Rabah Saâdane, ancien défenseur, a promis de revoir son organisation offensive… après la CAN! "Nos attaquants ont un grand cœur mais leurs lacunes sont criantes. Il faut un gros boulot sur le placement et l’efficacité", réclame Madjer, désormais consultant pour la chaîne Al-Arabiya.

En attendant, les défenseurs algériens auront une double responsabilité. "Il faudra non seulement arrêter Drogba, l’un des meilleurs attaquants au monde, mais aussi profiter de la moindre faille pour marquer sur les balles arrêtées, résume le joueur arabe du siècle. Notre seul but, contre le Mali (1-0), a été inscrit par un défenseur central, Halliche. Encore heureux que nos arrières aient de bonnes aptitudes dans le jeu aérien…" Au premier tour, seul le Burkina Faso a marqué moins de buts que l’Algérie (zéro) mais en ne disputant que deux matches suite au départ des Togolais.

"Le sélectionneur doit être maintenu"

Leur qualification, les partenaires de Karim Ziani l’ont arrachée au prix d’une parodie de jeu, une passe à dix contre l’Angola (0-0) qui qualifiait les deux pays aux dépens du Mali. Une manœuvre grossière qui rappelle le nul "arrangé" entre l’Autriche et la RFA au Mondial 82, qui avait privé la génération Madjer d’une qualification méritée. Victime inconsolable à l’époque, l’ancien joueur du RC Paris absout bien facilement ses lointains successeurs: "Le problème, c’est que le résultat du Mali était connu, les deux équipes n’ont pas voulu augmenter le rythme car elles pensaient déjà aux quarts de finale." La Fédération malienne a toutefois déposé une réclamation contre cette "attitude antisportive contraire à l’éthique".

Face à un vrai gros favori comme les Eléphants de Vahid Halilhodzic, les demi-finales sont-elles accessibles? "La Côte d’Ivoire a été laborieuse contre le Burkina Faso (0-0), mais ce sera très difficile. Il faudra beaucoup de cœur…" Madjer s’efforce de ne pas briser le rêve de son peuple mais reconnaît avec diplomatie que les Fennecs ont plus d’honneur que de talent. Pas un hasard si aucun joueur n’évolue dans un grand club européen. "En tout cas, je demande que le sélectionneur soit maintenu à son poste même si nous perdons, anticipe-t-il. A cinq mois de notre premier Mondial depuis une éternité, nous avons besoin de stabilité."

Source: JDD papier